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Signes d’appel et conduite à tenir

Les signes d’appel initiaux sont très variés, mort, atteinte neurologique grave ou moins grave (hypotonie, somnolence…) mais aussi atteinte pouvant être trompeuse : vomissements, enfant geignard, troubles du sommeil, mauvaises prises alimentaires, pauses respiratoires, pâleur, etc. Il faut savoir évoquer le diagnostic et faire hospitaliser l’enfant.
L’examen clinique minutieux comprend en particulier la palpation, la palpation de la fontanelle, la mesure du périmètre crânien, à rapporter sur la courbe et l’examen complet de l’enfant dénudé à la recherche d’ecchymose.
Signes et symptômes initiaux pouvant ou devant faire évoquer le diagnostic de syndrome du bébé secoué ou risquant d’égarer ce diagnostic ?
  • Il existe une grande hétérogénéité clinique :

    « Dans les cas les plus graves, l’enfant a été trouvé mort

    L’enfant présente des signes évoquant d’emblée une atteinte neurologique grave, imposant une prise en charge immédiate :

    • convulsions ;
    • malaise grave décrit par les parents (« j’ai cru qu’il allait mourir », « il s’est arrêté de respirer ») ou constaté par le médecin (trouble grave de la vigilance, pauses respiratoires, bradycardie) ;
    • troubles de la vigilance allant jusqu’au coma ;
    • apnées sévères : très spécifiques des TCI par rapport aux TC accidentels (dans l’étude de Maguire et al. leur valeur prédictive positive est de 93 %) ;
    • plafonnement du regard ;
    • signes orientant vers une hypertension intracrânienne aiguë, voire précédant un engagement : troubles de la posture (décortication ou décérébration, accès d’hypertonie), bradycardie, hypertension artérielle, troubles du rythme respiratoire.

    L’enfant présente des signes qui doivent orienter vers une atteinte neurologique :

    • modifications du tonus (hypotonie axiale) ;
    • moins bon contact (enfant répondant mal aux stimuli, ne souriant plus) ;
    • diminution des compétences de l’enfant ;
    • macrocrânie avec cassure vers le haut de la courbe (importance du carnet de santé) ;
    • bombement de la fontanelle.

    L’enfant présente des signes non spécifiques pouvant égarer le diagnostic :

    • modifications du comportement décrites par les accompagnants : pleurs, geignement, irritabilité, modifications du sommeil, mauvaises prises alimentaires, moins de sourires ;
    • vomissements ;
    • pauses respiratoires ;
    • pâleur ;
    • bébé qui semble douloureux.

    De toute façon, l’examen doit être minutieux et complet, sur un nourrisson dénudé, comprenant en particulier la palpation de la fontanelle et la mesure du périmètre crânien, à reporter sur la courbe, la recherche d’ecchymoses sur tout le corps, y compris sur le cuir chevelu.

    Étant donné la non-spécificité de plusieurs de ces signes, leur association prend tout son intérêt (cf. tableau 1). Ainsi les vomissements, qui sont un symptôme très fréquent et banal, doivent alerter s’ils sont associés à une fontanelle bombée, une hypotonie axiale, des troubles de la vigilance ou une cassure vers le haut de la courbe de périmètre crânien. »
    Extrait du rapport d’orientation de la commission d’audition.

    Les signes qu’on vient de décrire sont également à rechercher dans les antécédents de l’enfant (carnet de santé) car ils peuvent témoigner d’un éventuel TC antérieur.
    Certaines données de l’anamnèse peuvent évoquer un TCI :

    • retard de recours aux soins, manque de réactivité de l’entourage ;
    • absence d’explications des signes cliniques observés :
    • dans la série de Mireau, l’entourage ne décrit aucun traumatisme quel qu’il soit dans 71,6 % des cas, malgré des interrogatoires répétés,
    • pour Hettler et Greenes , le fait qu’aucune histoire traumatique ne soit d’emblée évoquée est très discriminant des TCI par rapport aux TC non infligés (69,3 % des cas versus 3 % [p < 0,001], avec une haute spécificité [0,97] et une valeur prédictive positive élevée [0,92]) ;
    • plus évocatrices, des explications non plausibles : par exemple, ecchymoses chez un bébé qui ne se déplace pas ;
    • histoire changeante selon le moment ou l’interlocuteur ;
    • histoire rapportée spontanément d’un TC minime ;
    • enfant qui est décrit comme pleurant beaucoup, ou qui a déjà consulté pour pleurs ;
    • antécédent de traumatisme, quel qu’il soit ;
    • antécédent de mort non ou mal expliquée dans la fratrie.

    Suspecter le diagnostic de secouement doit conduire le médecin à faire part aux parents de son inquiétude sur l’état de l’enfant, et à poser l’indication d’une hospitalisation en urgence

  • Conduite à tenir

    « Lorsqu’un bébé est amené mort et s’il ne s’agit pas de l’évolution terminale d’une pathologie connue

    Le diagnostic de TCI doit être évoqué systématiquement parmi les causes de mort inattendue. L’entretien avec l’entourage proche doit être respectueux, mais aussi minutieux pour connaître les conditions décrites du décès.

    Certains signes doivent attirer l’attention :

    • explications données non plausibles ;
    • déclarations changeantes (mais l’émotion des parents peut être une explication) ;
    • maltraitance antérieure déjà soupçonnée, autre(s) décès mal expliqué(s) dans la famille.

    De toute façon, devant une mort inattendue du nourrisson, il est recommandé23 d’obtenir le consentement des parents à une autopsie qui permettra éventuellement de recueillir les éléments du diagnostic de secouement (en sachant que tout élément de suspicion peut amener à alerter le procureur de la République qui pourra ordonner une autopsie médico-légale).

    Devant une détresse neurologique aiguë inaugurale

    l’état clinique conduit à pratiquer en urgence un scanner cérébral, et, devant la constatation d’hémorragies intracrâniennes, à rechercher la présence simultanée d’autres signes de secouement :

    • HR ;
    • signes de mauvais traitements (lésions cutanées, lésions osseuses) ;
    • explications non plausibles ou changeantes données par l’entourage.

    Devant des signes qui doivent orienter vers une atteinte neurologique

    tels que décrits plus haut (modifications du comportement, mauvaises prises alimentaires, moins bon contact, moins de sourires, diminution des compétences de l’enfant ; modifications du tonus [hypotonie axiale]), mais aussi devant certains signes non spécifiques (vomissements, troubles respiratoires [pauses, apnées], pâleur, bébé qui semble douloureux), l’essentiel est d’évoquer un secouement :

    • la palpation de la fontanelle, la mesure du périmètre crânien et l’examen de la courbe de PC, gestes qui doivent être systématiques lors de tout examen d’un nourrisson, peuvent objectiver un bombement de la fontanelle, une macrocrânie avec cassure de la courbe de PC vers le haut ;
    • rechercher : l’association des signes cités plus haut (cf. tableau 1), retrouvée dans un pourcentage important de cas de secouement,
    • rechercher d’autres signes de maltraitance (par l’examen clinique et l’étude des antécédents) ;
    • noter lors de l’entretien l’existence d’un retard dans le recours aux soins,
    • noter lors de l’entretien le fait que les explications données par l’entourage sont non ou peu plausibles, ou changeantes selon le moment ou l’interlocuteur ;
    • rechercher des HR ;
    • pratiquer d’emblée un scanner cérébral (l’IRM étant réalisée de manière différée et quand l’état de l’enfant le permet).

    Certains des arguments peuvent manquer et il est impossible, dans l’état actuel des connaissances, de pondérer chacun de ces éléments. Cependant, certains ont une valeur plus spécifique :

    • sur le plan clinique : en plus des données de l’interrogatoire, l’existence d’apnées, d’ecchymoses (du scalp ou autres localisations) ;
    • l’analyse des résultats du scanner : les hémorragies sous-durales (cf. iconographie) ou sous-arachnoïdiennes sont plus fréquentes (cf. description ci-dessus) que les saignements intraparenchymateux, et les HED sont exceptionnels en cas de SBS ;
    • l’examen du fond d’œil : l’existence d’HR de tous les types, même unilatérales (cf. tableau 3), a fortiori profuses ou éclaboussant la rétine jusqu’en extrême périphérie, associées à une ou plusieurs vastes hémorragies en dôme ou en placard (ayant parfois l’aspect caractéristique d’un rétinoschisis hémorragique) ou à un pli rétinien périmaculaire (type 3 de Defoort-Dhellemmes quasiment pathognomonique du SBS). »
      Extrait du rapport d’orientation de la commission d’audition.

A distance du secouement

Certains symptômes neurologiques ou neuropsychologiques, certaines images neuroradiologiques peuvent, a posteriori, faire évoquer un secouement. Il faut alors reprendre le carnet de santé à la recherche d’une cassure de la courbe de périmètre crânien (mais à ce stade, c’est une microcéphalie que l’on constate) et réaliser une IRM.

Bibliographie

1 Maguire S, Pickerd N, Farewell D, Mann M, Tempest V, Kemp AM. Which clinical features distinguish inflicted from non-inflicted brain injury A systematic review. Arch Dis Child 2009;94(11):860-7.

2 Mireau E. Hématome sous-dural du nourrisson et maltraitance. À propos d’une série de 404 cas. Thèse de médecine. 2005. Université Paris V.

3 Ibid.